vendredi 8 décembre 2017

Mieux comprendre le vote de la loi Warsmann sur le régime d’asile européen

Pendant la nuit de jeudi à vendredi, la proposition de loi du député Jean-Luc Warsmann sur le droit d’asile a été votée à l’Assemblée nationale par 41 voix contre 11 voix, dont celle de la députée du Morbihan, Nicole Le Peih. En début de semaine, les Gens Heureux d’accueillir des réfugiés avaient alerté les députés des quatre départements bretons dans lesquels résident désormais les demandeurs d’asile accueillis l’hiver dernier dans le Trégor. Aucun n’a répondu. En quatre jours, une pétition dénonçant cette loi a réuni 549 signataires. jeudi 7 décembre, Jacques Toubon, le Défenseur des droits dénonçait  la banalisation de l’enfermement des étrangers, « au mépris du respect des droits fondamentaux les plus élémentaires ».

La campagne de Frontexit, menée par la Cimade,
la LDH et d'autres associations européennes.
www.frontexit.org
Alors que la Cour de justice de l’Union européenne et la Cour de cassation avaient jugé contraire au droit le placement en rétention administrative de demandeurs d’asile sous le régime de Dublin, un député des Ardennes, Jean-Luc Warsmann (LR) a déposé une proposition de loi dont l’objectif assumé est de faciliter la rétention pour augmenter le nombre de transferts de demandeurs d’asile. Selon le juge, le placement en centre de rétention administrative (CRA) n’est possible que si le demandeur risque de s’enfuir. En définissant ce risque de fuite selon dix critères et en permettant l’enfermement en CRA plus tôt dans le parcours des demandeurs d’asile, la nouvelle loi complexifie encore les textes et durcit le droit d’asile.

1298 étrangers sous procédure Dublin, transférés en 2016
Pendant l’examen du texte, soutenu par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, le député Warsmann a indiqué « qu’en 2016, seuls 1 293 des 14 308 étrangers sous procédure « Dublin » avaient été transférés ». Les députées de la France Insoumise ont pratiqué l’obstruction législative, en défendant une multitude d’amendements, avec l’idée que la séance devant être levée à une heure du matin, l’Assemblée Nationale n’aurait pas le temps de voter l’ensemble du texte. Toutefois, la décision du président de séance de dépasser l’heure convenue a fait échouer cette tactique.

Nicole Le Peih vote contre la loi Warsmann
A une heure et demi, le texte était voté par 41 députés de La République en marche, du Modem, de l’UDI et apparenté FN. Parmi les onze voix contre, on repère des députés de la France Insoumise, du Parti Socialiste et de LREM, notamment Nicole Le Peih, députée du Morbihan (détails dans l’analyse de scrutin).

Alors que le président de la République a annoncé une « refondation complète » de la politique d’immigration pour le printemps (voir article du Monde paru en septembre), les Gens Heureux s’inquiètent des orientations qui apparaissent avec cette proposition de loi. Ils reprennent à leur compte les critiques émises par la Cimade (voir communiqué de presse).

Mépris des droits fondamentaux selon Jacques Toubon
Les Gens Heureux saluent la prise de position de Jacques Toubon, Défenseur des droits, qui voit dans cette loi « un tournant politique déplorable en termes de respect des droits et des libertés fondamentales » et une banalisation de l’enfermement des étrangers, « au mépris du respect des droits fondamentaux les plus élémentaires ».

Les Gens Heureux  s’interrogent aussi sur la constitutionnalité de cette loi. Selon le juriste Pierre Januel, « la jurisprudence du Conseil constitutionnel prévoit que le placement en rétention n’est possible que dans un but de sauvegarde de l’ordre public, « lequel commande de prendre les mesures nécessaires à l’éloignement des étrangers en situation irrégulière » (commentaire de la décision n° 2003-484 DC). Dès lors que la rétention de l’étranger n’a pas pour but d’exécuter une décision d’éloignement, il y a lieu à s’interroger sur la constitutionnalité de cette proposition de loi ».


Enfin, les Gens Heureux souhaitent qu'Eric Bothorel, député de la 5e circonscription des Côtes-d’Armor maintienne ses engagements de campagne, quand il écrivait aux Gens Heureux qu’il remettrait en cause les accords de Dublin. « J'étais aux côtés de Corinne lors de la contre manifestation faisant face à celle du FN, dite anti-migrants, déclarait-il. Je me suis, il y a plusieurs mois, porté volontaire auprès de l’association Singa Project (aide aux réfugiés). Ma sensibilité, mes valeurs et mon parcours sont en phase avec les combats que vous portez et que je mènerez demain en tant que parlementaire si les électeurs me font confiance. »

> + d'infos
Une dépêche Reuters sur le vote de la loi Warsmann

Pourquoi la proposition de loi sur le renforcement de la rétention des migrants inquiète les ONG, 20 minutes


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